Lettre ouverte au ministre des deniers publics

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Monsieur le ministre des deniers publics,


J'ai la joie de vous adresser mes félicitations, lesquelles vous agréent ou non, qu'importe. Vous m'avez infligé une amende fiscale de 388 euros pour ne pas avoir fait ma déclaration d'impôt en temps opportun.  J'ai oublié, j'étais dans les nuages; cette année-là a été pour moi une année particulièrement noire : j'ai été hospitalisé deux fois pour oedème pulmonaire.  Cette année noire ne l'a pas été pour vous. Vous avez profité de ma faiblesse, vous m'avez maltraité pour le bien du trésor public, et donc légalement. Pas de passage devant le juge, pas de passages sous ses fourches caudines non plus. Le président de la République devrait vous donner la légion d'honneur à vous, un si bon serviteur tout occupé à enrichir le trésor public, qui présente pourtant de bien grands signes de faiblesse.

Et qui m'a sorti du pétrin que vous avez mis à ma disposition ? C'est ma fille Nathalie, titulaire d'une licence en droit et d'une maîtrise droit des affaires. Elle a payé vos 388 euros, rubis sur l'ongle. Soyez heureux et sachez qu'elle prend en main la page
impôts.gouv.fr.  Vous ne pourrez plus me nuire. Malheureusement les contribuables septuagénaires,  octogénaires, nonagénaires n'ont pas une Nathalie pour les sortir du pétrain mis à leur disposition par vos bons soins. Et comment vos contribuables grabataires vont-ils pouvoir consulter la page impôts.gouv.fr. On peut lire dans cette page d'une stupidité déconcertante : " Rendez-vous sur le service gérer mon prélèvement à la source, accessible dans votre espace particulier sur impôts.gouv.fr". Mon pauvre ministre de nos deniers publics, vous semblez ne pas voir plus loin que le bout de votre nez. Comment des grabataires pourraient-ils lire votre précieuse page sur les impôts ? Ils ne le peuvent plus. Ils ont leurs regards tournés vers le Ciel, un Ciel plein de bons sens qui les attend, un Ciel qui les débarrassera à tout jamais, ici bas, de la maltraitance ministérielle. Ils trouveront la-haut une grande humanité qui vous fait horriblement défaut.

Et puisque vous cherchez beaucoup de deniers pour notre trésor public, pourquoi chercher loin ce que l'on peut avoir si près ? Un élu moissonne de belles indemnités et le fonctionnaire d'Etat, haut ou non, est loin de crier misère : tous ces braves gens sont payés à prix d'or. Notre clairvoyant Coluche vous dira : "il y en a qui sont plus égaux que d'autres dans notre République". Une infimière des hopitaux a de multiples tâches et elle n'a qu'un seul salaire; un ouvrier agricole trait les vaches, taille les haies, laboure, herse; en définitive le patron ne lui donne qu'un seul salaire.  Oui, monsieur le pauvre ministre, il y a  des contribuables qui sont plus égaux que d'autres; ils ont comme gagnés au loto. Que faire ? raboter les hauts salaires; établir un plafond, par exemple, 6000 euros par mois, et on n'aura plus un seul rapace de notre pauvre République, comme c'est le cas maintenant. Pas la peine de s'en prendre au social. Oui, mon pauvre ministre, vous aurez l'air d'être un peu plus humain, vous qui m'avez piqué 388 euros. Et pour mieux faire, dans les restaurants d'Etat comme celui du préfet, chaque convive doit payer son repas; ce n'est plus aux contribuables de payer; il faut supprimer cette niche fiscale au plus vite.

Allons encore plus loin. Une promesse que le président de la  République,  Emmanuel Macron,  n'a pas encore  tenue : diminuer le nombre de parlementaires; eh bien, la fée internet nous donne cette opportunité : glisser dans son enveloppe électorale deux noms avec ceux des suppléants.

Pour les législatives et les sénatoriales, il faut voir tous les candidats sur le même pied d'égalité, sur le même starting-block, l'un à côté de l'autre. Chacun prépare sa campagne sur son ordinateur : un dossier doit y être consacré, qui expose son programme et présente ses vidéos. L'agriculteur peut se lancer dans la bataille après son travail, de même le boulanger et le petit patron. Riches ou pauvres, les candidats sont à une parfaite égalité. Suppression alors des subventions de l'Etat au profit des partis politiques : un petit ordinateur ne coûte pas grand chose. Soulageons la grosse dette publique. Et le jour J, le jour des élections, on glisse dans son enveloppe le nom de deux candidats, de trois par exemple dans les départements qui comptent une grande ville avec circonscriptions. Il ne faut plus la quantité, mais la qualité, voilà ce que le bon peuple attend. Moins de parlementaires, c'est réduire ou même anéantir un éventuel capharnaüm. Un avantage indéniable : on soulage notre grosse dette publique. Par ailleurs, plus aucun débat public, plus d'affichages sauvages ici et là. Belle économie en perspective : pas de policiers pour surveiller les débats publics, pas de procès possibles suite à la campagne électorale. Belle économie dont pourraient profiter mes amis, les agriculteurs, assommés par les directives européennes et mes amis, les policiers, accablés de travail à cause de la drogue et du péril islamiste. Les réactions des électeurs au programme du candidat, on pourra les voir sur internet, Instagram, Facebook, TicToc, etc.

Ajoutons d'autres articles à cette constitution à corriger.

Il faut un plafond à tous les fonctionnaires et élus, soit, par exemple, l'équivalent de 6 smic net par mois, et une seule indemnité, un seul salaire, comme les ouvriers : ceux-ci ont beau avoir  des tâches variées, ils ne  touchent qu'un seul salaire.  Fonctionnaires et élus doivent être traités de la même façon : plus de cumul de mandats rétribués,  plus d'ajouts financiers pour avoir fait ceci ou cela.  Ils exercent une fonction et ils doivent être payés  pour cette fonction comme l'est l'infirmière dans les hôpitaux. On doit cesser  d'être un pilleur d'Etat, un rapace dans l'Etat. Voilà  une mesure qui va diminuer  l'énorme dette publique. Et pour les restaurants d'Etat, comme ceux de  l'Assemblée  nationale  et des préfectures, chacun doit payer ses propres consommations. Plus de ticket-restaurant jusqu'alors au frais du contribuable. Seuls seront nourris par les deniers publics  les pompiers  qui  luttent contre un incendie, les policiers à la poursuite d'un délinquant, les infirmières des hôpitaux. Ces fonctionnaires ne peuvent pas entrer chez eux pour se restaurer. Bien sûr, le palais de l'Elysée doit garder son restaurant qui reçoît souvent des chefs d'Etat et d'autres personnalités. Bien sûr, le président de la République et ses ministres gardent le traitement actuel : ils sont constamment en activité.

Enfin, il faut un plafond pour les retraites financées par les contribuables, soit, par exemple, l'équivalent de 5 smic net par mois; le reste doit revenir à notre Caisse Sociale; il faut que l'on soit réellement solidaire. A la retraite, il n'y a pas lieu de thésauriser. D'ailleurs, si on en croit la mythologie grecque, Nocher, qui conduit son mort aux Enfers le fera traverser le Styx, moyennant une obole, pas même un euro. Vraiment, il n'y a pas lieu de thésauriser.  Il faut également fixer un seuil pour ces retraites, soit, par exemple, l'équivalent d'un smic net par mois, les riches venant au secours de ceux qui ont été dans la peine au cours de leur vie. Oui, les riches doivent prêter mainforte : la solidarité s'impose dans cette VI ème République. Et sa devise sera :  liberté, égalité, fraternité, solidarité.

Vive ma VI ème République ! Vive la France !

Sur ce, le sourire aux lèvres,  Monsieur le Ministre des deniers publics, je vous prie d'agréer l'expression de ma considération la plus sincère.

A Grenoble, résidence Montesquieu, le 13 juin 2025

Gérard Jeanneau, professeur de lettres classiques, toujours en activité à l'Université de Louvain.











         Copie de l'amende fiscale

         Solidarité

         Mea culpa d'Emmanuel Macron

       Eric Lombard

        mon article chez Mediapart




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