Un enfant, conçu naguère
au fond
d'une éprouvette, clame haut et fort sa profonde admiration : le
flaperon découvert sur la plage de Saint-André connaît son origine.
Oui, on a pris soin de lui décerner un numéro, de noter là où il a été
fabriqué. On sait tout de ce précieux débris emporté par les flots
jusqu'aux rivages de La Réunion. Il est connu du monde entier et même
de l'oncle Sam qui, d'ordinaire, est long à s'émouvoir pour des petits
riens qui se déroulent à l'autre bout du monde.
Et ce même enfant, naguère bébé-éprouvette, crie au scandale, un
scandale étrangement bien couvert par la loi : épave née sous
X, comme l'autre épave abandonnée également sous X, il ne sait pas qui
est son papa ni qui est sa maman; il ne pourra jamais le savoir car il
ne figure dans aucun matricule. Le laboratoire, usine à bébés, n'a que
faire de cette considération et ne se préocupe que de faire un beau
bébé, comme l'agriculteur veille attentivement à avoir un beau veau
dans son étable.
Cet enfant qui voit toute la considération que le monde entier accorde
à ce flaperon, exige que le législateur proclame urbi et orbi cette
loi qui tombe sous le bon sens et donc parfaitement légitime :
désormais, ni naissance sous X ni abandon sous X; le bébé a droit à sa
dignité d'être humain; il doit connaître ses origines à sa majorité; le
laboratoire, usine à bébés, sera dans l'obligation de tenir un
matricule des naissances avec l'identité des géniteurs. Et l'orphelinat
de même. La discrétion, oui, mais avec des limites dans la
durée. Il en va de la dignité du bébé-éprouvette sous X ou du bébé
abandonné sous X !
Il veut seulement la même attention qu'on accorde au flaperon de
Saint-André pour se sentir pleinement un membre reconnu dans la
société, pour bien s'épanouir en pleine lumière, hors du fé
noir dans lequel le plonge l'actuelle diabolique législation.
|