L'agent territorial spécialisé d'école maternelle (ATSEM) s'occupe des enfants d'une école
maternelle et seconde efficacement la maîtresse. Ces dames ATSEM, les taties des enfants, sont précieuses pour
les maîtresses et pour les bambins; précieuses aussi, pour certains
maires de La Réunion, de l'or à leurs yeux, des biens meubles, dirait
Sudel Fuma, de dociles serves, corvéables à merci, de simples dames-pipi ou encore,
selon l'heureuse expression de Jean-Marie Virapoullé, du bétail.
Et notre Moyen-Âge, à La Réunion, est ressuscité surtout grâce à deux
maires-seigneurs, Claude Hoarau, le seigneur de Saint-Louis et Éric
Fruteau, le seigneur de Saint-André. Cloclo - c'est le ti nom gâté que ses
intimes donnent à Claude Hoarau; les malicieux empruntent le même, mais
en supprimant la petite consonne l.
Cloclo, dis-je, a fait son tri sélectif dans ses biens meubles :
certaines ATSEMs ont reçu un aimable congé - et définitif - pour ne
s'occuper que de leurs propres enfants, d'autres ont été mutées à
l'autre bout de la seigneurie. Et selon son bon vouloir. Il lui
plaisait, selon la formule consacrée... D'autres biens meubles ont
connu un sort semblable sur ses terres. Voilà ce qui arrive à ceux qui
n'accordent pas assez d'attention au seigneur du lieu. Le Moyen-Âge
suit son cours. Le père Lafosse doit se retourner dans sa tombe!
L'Histoire ne fait que se répéter.
Et le Moyen-Âge suit miraculeusement son cours à Saint-André, et de la
même manière. Autre maire, autres mœurs! Éric Fruteau, le seigneur de
Saint-André, a manié ses biens meubles avec la même gentillesse. Et il
vient de faire un joli cadeau de Noël à sa troupe de serves : il oblige
ses ATSEMs à exécuter une agréable corvée : s'occuper des toilettes des
centres aérés, une heure par jour, pendant les vacances scolaires,
histoire de ne pas leur laisser perdre la main! Les dames-pipi de
Saint-André doivent la nuit rêver à leur activité favorite. On ne sait
pas quoi faire de mieux pour les déshumaniser ! Et pendant ce temps-là
les érémistes de sa seigneurie tapent le domino ! Et pendant ce même
temps les maîtresses profitent pleinement et à juste titre de leurs
vacances. Que voulez-vous ? On est serf ou on ne l'est pas. Une petite
heure, c'est peu de chose ! C'est tout de même une journée où l'on est
prié de rester près de chez soi, comme on le ferait en cas de maladie !
Placet,
dirait en latin son voisin latiniste de Saint-Benoît, qui porte le même
nom! Éric, comme doivent l'appeler ses intimes, sait soigner son monde.
Il sait faire du social. La preuve, il a trouvé une petite monnaie pour
augmenter les indemnités de son entourage, ses vassaux ! Elle est
belle, la vie, à Saint-André !
Mis à part ces rudes taquineries, pourtant bien justifiées, il serait
bon de résoudre une fois pour toutes le sort de ces dames ATSEMs, les
oubliées de l'Éducation nationale où elles jouent un rôle important, à
la différence de celui des TOS, ouvriers de nos collèges et lycées, qui
ne sont jamais en contact avec les élèves. La FSU, agrégat de syndicats
de gauche, jure ses grands dieux qu'elle s'occupe de tous les problèmes
de l'Éducation nationale. Elle s'intéresse à tous les personnels, sauf
aux ATSEMs, sans jamais faire l'effort de chercher à les arracher de la
tutelle des mairies et à les intégrer dans l'Éducation nationale. On a
dégraissé le mammouth de Claude Allègre! C'est une bonne chose. On
pourrait traiter les ATSEMs comme celles qu'elles secondent et les
rétribuer comme l'étaient les TOS des lycées et collèges. Ainsi on
mettra fin à la dernière trace bien visible de servage à La Réunion.
Même en métropole, des ATSEMs, qui ont passé avec succès leur examen,
ne sont pas titularisées. Là-bas également sourd ici et là un petit
quelque chose du servage.
On ne peut que souhaiter que la FSU ait l'amabilité de déposer sa
faucille et son marteau, d'ôter ses oeillères et de venir enfin au
secours de ce personnel oublié, même si ce n'est pas d'un grand rapport
en voix pour elle, et que madame la députée, Huguette Bello, se penche
aussi sur ce problème et fasse les démarches à l'Assemblée nationale où
elle siège. Sensible au sort des femmes, elle ne peut se permettre de
laisser le servage des femmes sévir à La Réunion comme il sévit
actuellement.
Gérard Jeanneau
La Possession, mardi 22 décembre 2009
Aux Avirons, non plus, le maire, infirmier de son état, n'est pas aux petits soins pour ses Atsems.